In de Wulf

Déjeuner du vendredi 18 avril 2008

Vous allez me trouver excessif. Et vous avez raison. Cela fait partie de ces choses qui sont plus fortes que moi. Quand j’aime une adresse, un endroit, je ne compte plus. Et surtout pas le nombre de visites.

Alors quand est venu le moment d’organiser un event professionnel pour mon équipe, je n’ai pas hésité une seule seconde. Après Anne de Bretagne et la Mare aux Oiseaux en 2005, après L’Air du Temps en 2006 et la Grenouillère en 2007, je ne pouvais pas ne pas faire découvrir In de Wulf à mes camarades de boulot (dont Nico et Vincent par ailleurs, membres émérites de GoT… eh oui, y’en a qui cumulent… :o).

Histoire de l’organiser dans des délais assez courts et sans trop de contraintes logistiques, allons-y pour déjeuner, un vendredi midi (aller/retour depuis Paris dans la journée, largement jouable… :o).
Il y a de plus régulièrement de la place pour accueillir de grandes tables en semaine et le chef Kobe me confirme début avril qu’il nous réserve le restaurant. Magnifique.

En repérage sur les lieux (j’aime bien repérer…:o) quelques semaines plus tôt, j’ai eu l’occasion d’échanger avec le chef sur le menu, le principe all-in (apéro, vins, eaux, etc…) pour un budget défini à l’avance.

Tout était donc prêt en ce doux vendredi de printemps pour vivre un beau moment humain et collectif – nous serons 16. Avec le recul nécessaire, le fait est que non seulement le moment fut délicieux, mais de plus, j’ai probablement vécu l’un de mes 2 meilleurs repas chez Kobe (sur la quinzaine de repas en 1 an) et je peux même aller plus loin, l’un de mes tous meilleurs jamais vécus dans l’absolu (ce qui veut dire Top10 me concernant).

Je ne reviendrai pas sur le lieu, accueillant, de bon goût et hors du temps, ni sur le service jeune et enthousiaste, mais je ne peux non plus laisser ce menu sous silence et un post s’impose… dont acte.

Croquants au porc, mayonnaise à la mimolette

Foie d’Or – version 2008

Crème aux crevettes

Textures d’huîtres

Aspic d’huître et concombre

Granité d’herbes, sardine, brioche et tomate noire de crimée

Emulsion de hareng fumé, bulots et caviar de hareng

Tartare de boeuf “West vlaams”, mimolette, herbes vertes, oignons

Asperges au tartare de coquille et crabe de mer du Nord, vinaigre de bière

Maquereau fumé, betterave, huître perle blanche, fromage maroilles

Seiche, nouveaux petits pois, bouillon de seiche et badiane

Homard breton, crème de pommes de terre et corail

Turbot, artichauts bretons, bouillon de volaille et oignons

Langoustine, crème de cabillaud et caviar de cabillaud fumé, asperges

Morilles, jus de morilles, foie gras de canard, champignons et oeuf de caille

Veau, oignons des bois et ail des ours

Assortiment de fromages affinés par Philippe Olivier

Deux premiers desserts : Chicorée et poire; Texture de noisettes

Fraises “Gariguette” et rhubarbe

Bêtises de Cambrai

Mignardises

Un fabuleux repas, 6h30 de bonheur, un sans-faute total du début à la fin … cuissons, présentations, qualité des produits, saveurs exhaustées, plats équilibrés; une vraie générosité dans l’assiette et la cuisine déployée par Kobe … les photos parlent quasiment d’elles-mêmes, pas la peine d’en rajouter.

En plus d’un apéritif au champagne, 6 vins furent servis et dégustés pour accompagner ce menu; tous de très bonne facture dont un Macon Vieilles Vignes d’Olivier Merlin au rapport qualité/prix impressionnant, une belle découverte.

Découvrir In de Wulf, c’est une fois de plus ce que je peux souhaiter à chacun…

Laurent V

Des classements, encore des classements…

En moins de quelques semaines sont apparus deux nouveaux classements de restaurants :

– le San Pellegrino World’s 50 Best Restaurants

– le Fine Dining Survey 2008 d’Opinionated About Dining, classement des 100 meilleurs restaurants d’Amérique du Nord et Europe

Le premier est communiqué chaque année à même époque et est la résultante des votes d’un panel de spécialistes, journalistes et critiques.  Ce classement paraît dans le magazine anglais Restaurant.

Le second est à l’initiative d’un passionné (Steve Plotnicki) qui a lancé depuis quelques temps une enquête sur le web où chaque internaute, passionné, gastronome, amateur ou professionnel, peut s’inscrire et évaluer les restaurants qui y sont répertoriés. Contrairement au World’s 50 qui se veut « mondial » mais qui dans son palmares n’affiche aucun restaurant asiatique (ce qui paraît effectivement incroyable et pose une réelle question de crédibilité quand on sait que le Michelin salue 191 étoilés rien qu’au Japon… ), le petit guide OAD de Steve reconnait « ne couvrir » que l’Amérique du Nord et l’Europe.

Intérêt pour l’internaute qui participe à l’enquête OAD : il recevra un exemplaire du guide gratuitement à son domicile, ce qui m’est arrivé semaine dernière. Pas très épais, on n’y recense « que » 100 tables, mais de qualité sur la forme et sur le fond (tarif normal du guide sans participation à l’enquête : 6,95$). Pour y participer et/ou le commander, c’est ici. Et le verdict est intéressant.

Je ne vous imposerai pas une relecture du classement des World’s 50, vous pouvez la retrouver en suivant ce lien. Mes seuls commentaires (en dehors de la couverture soi-disante mondiale déjà évoquée) sont les suivants :

– Intéressante progression des quelques tables contemporaine ou de cuisine « progressive » – nouveau terme fort usité : noma (n°10, +5), L’Astrance (n°11, +10), Alinéa (n°21, +15). On constate que les tables réputées d’avantage pour leur assiette et leur modernité/créativité gagnent le devant de la scène : l’école espagnole est plus que jamais présente même si le classement d’El Poblet à la 66ème place semble aberrante.

– Le classement incompréhensible de L’Arnsbourg (n°73) ou Roellinger (n°86)… no comment…

– La présence du Chateaubriand à Paris (n° 66) : rien à dire sur la cuisine ni le talent de l’équipe et la démarche assumée par cette adresse. Mais la retrouver devant les tables ci-dessus et de fait devant des Laurent Petit au Clos des Sens ou Kitchen Galerie en France, des Air du Temps ou In de Wulf en Belgique, sans parler d’un Thierry Marx ou les 2 étoilés de Reims qui n’apparaissent nulle part, c’est à n’y rien comprendre.

Je me suis dès lors amusé à comparer les 2 classements, sur les 50 premières places, en rappelant toute fois que le classement de Steve et ses internautes ne concernent principalement que les US et l’Europe; voici ce classement par points (je vous passe les détails du calcul des points) :

116pts Troigros, FR

115pts Bras, FR

114pts The Fat Duck, UK / L’Arpège, FR / Pierre Gagnaire, FR

113pts Urasawa, US

112pts El Bulli, ES / L’Astrance, FR

111pts L’Arnsbourg, FR / The French Laundry, US

110pts El Poblet, ES

109pts La Calandre, IT / Les Ambassadeurs, FR / Oud Sluis, NL / Jean-Georges, US / Manresa, US

108pts Etxebarri, ES / La Broche, ES / Le Louix XV Ducasse, FR / Mugaritz, ES

107pts L’Ambroisie, FR / Per Se, US

106pts El Celler de Can Roca, ES / Noma, DK / Alinea, US / McCrady’s, US

105pts Arzak, ES / La Pergola, IT / Minibar, US / Splendido, US

104pts Taillevent, FR / Roellinger, FR / Auberge de L’Ill, FR / Hof van Cleve, BE / Can Faber, ES / Ledoyen, FR / Providence, US / Sushi Yasuda, US / Le Bernardin, US

103pts Comme Chez Soi, BE / Elkano, ES / Lameloise, FR / Bouley, US / Hatfield’s, US / Kuruma Sushi, US / Masa, US

102pts Le Bristol, FR / Guy Savoy, FR / Marc Veyrat, FR / Craft, US / Marinus, US /

Si les 2 classements ne sont donc pas totalement comparables sur leur réalisation et couverture (bien plus large aux US évidemment chez OAD avec des tables moins connues et réputées plébiscitées par une majorité d’internautes US), sur l’Europe, et à l’exception de quelques tables comme Le Meurice, Le Cinq ou Berasategui qui n’y figurent pas, je ne peux m’empêcher de me sentir plus proche et rassuré par le classement de Steve.

Parce qu’il est basé sur des retours « du terrain » donnés par des gens comme vous et moi ? Ou parce qu’il est (pour le moment) dénué de tout enjeu commercial et économique que l’apport d’un sponsor pourrait peut-être dénaturer ? Ou les 2 ? Chacun se fera son propre avis mais le mien est fait… :o)

Laurent V

Le Meurice

Dîner du mercredi 9 avril 2008

Personnellement, il m’aura fallu quelques jours pour me remettre de ce dîner au Meurice.

Un tout grand dîner, un magnifique moment de gastronomie et partage entre amis. Un dîner longuement attendu et qui a répondu voir même dépassé nos attentes.

Avec un budget de départ de 3100 euros pour 7, soit notre cagnotte de 10 soirées de poker entre amis, on peut commencer à s’amuser. Et je me suis beaucoup amusé à préparer ce dîner. Dans le choix du menu, dans le choix des vins, dans le respect du budget.

Concernant le menu, je suis parti avec le menu dégustation actuel comme base de travail. J’y ai apporté quelques modifications qui ont été acceptées sans supplément… beau geste que nous avons apprécié.

Pour les vins, après avoir downloadé la carte des vins qui est en ligne sur le site du Meurice, j’ai pris le temps de la parcourir en long et en large afin d’identifier les bouteilles qui nous feraient plaisir. Etant 7 convives, le menu comportant une séquence de 8 plats, je suis donc parti sur une bouteille par plat, rythme très correct à 7. Mon objectif était double : s’offrir des bouteilles accessibles tout en se faisant plaisir, proposer des accords intéressants et/ou originaux sans pour autant rechercher l’accord parfait. 30 minutes d’échange téléphonique la veille de notre dîner avec Sébastien, sommelier, me convaincront dans mes choix. A J-1 tout est prêt pour le festin du lendemain !

20h. Avec Nagib et Laurent, nous sommes les premiers arrivés et installés dans ma magnifique salle à manger du Meurice. Le lifting opéré en fin 2007 sous la houlette des Starck est absolument réussi. Si les lustres, les dorures et marbres sont restés (et encore heureux), le mobilier, les luminaires de table, la vaisselle ont subi de profonds changements. L’atmosphère est nettement plus chaleureuse qu’avant, et l’ambiance générale beaucoup plus contemporaine, dans son temps. Personnellement, j’apprécie énormément.

 

20h30. Xavier, Vincent, Khaled et enfin Samir sont arrivés, nous sommes 4 de GoT sur les 7 convives joueurs de poker. Le service est d’emblée au top : pour patienter, on nous propose quelques petits amuses-gueules.

Très vite nous constatons qu’ici plus qu’ailleurs, on se soucie de notre confort à table, on se sentait attendu à vrai dire. Cela fait plaisir.

Nous entamons alors le menu avec une première mise en bouche en fraîcheur sur le concombre, très agréable.

Pour l’apéritif, j’avais choisi un champagne « de base » que j’aime particulièrement, un Jacquesson Cuvée 729.

Alors que nous attendions la première entrée prévue au menu, c’est une petite surprise « pour patienter » qui nous est offerte par le chef et son équipe :

Asperges vertes du midi en chaud-froid de saumon fumé, petits blinis aux condiments et aux grains de caviar

Ah, ce repas commence on ne peut mieux, d’autant qu’il reste encore quelques gouttes de champagne à marier avec le caviar et le saumon… un beau mariage aux notes fumées, iodées…

Fins coquillages ouverts à cru au corail d’oursin, gelée de molette de chou rouge aux baies de genièvre

Riesling Grand Cru « Hengst » 2001, Domaine Josmeyer

Premier grand moment en ce qui me concerne… le succès de ce plat réside dans la qualité des produits et le dosage de leur assaisonnement. C’est juste parfait. L’accord avec le Riesling fonctionne bien.

Fagottini fourrés au céléri fondant, truffe noire, copeaux de lard fondus et jus d’herbe

Domaine de la Grange des Pères 2004, Vin de Pays de l’Hérault, L. Vaillé

A l’unanimité, un plat fabuleux, offrant un contraste magnifique entre la douceur et le fondant des fagottinis au céléri et le jus d’herbes avec les copeaux de truffes… Un très grand plat.

Sur le vin, c’est probablement l’accord le moins évident. Mais je voulais ma Grange des Pères en blanc… et avec le sommelier, on s’était dit que c’était le plat pour l’associer. Un vin puissant, riche, gras, généreux, qui ne passe pas inaperçu. L’ensemble de la table a adoré : un accord certes mitigé mais un grand plat à ma gauche, un grand vin à ma droite : match nul, ex-aequo.

Grosses langoustines cuites au naturel, rapée de pomme verte et lait fermenté au sarazin

Puligny Montrachet « Les Combettes » 2002, L. Carillon

Ces langoustines sont des bêtes de compétition. Cuisson parfaite, magnifiques en goût. Le plat s’arrête cependant là car contrairement aux autres mets de ce menu, rien de surprenant ni de quoi s’exclamer. Vient alors le vin… et là, wow, l’accord est parfait. Ce Puligny, déjà bu et donc moins surprenant apporte la rondeur et le gras nécessaire à la fraîcheur du plat. Un magnifique moment…

Homard bleu cuit sous le grill et arrosé de beurre fondu au gingembre, pointes d’asperges au jus de carcasse iodé, les pinces à la mayonnaise de corail

Meursault « Les Chevallières » 2003, J-F. Coche Dury

On monte encore en puissance : ce homard et ces asperges qui l’accompagnent sont sublimes, la mayonnaise de corail est fantastique en texture et goût. L’association avec le Coche Dury est sensationnelle, délivrant sa puissance, ses parfums, se mariant à merveille… Un moment inoubliable, et pas seulement pour moi : pour la table entière…

Noix de ris de veau croustillant au sautoir, cheveux d’ange à la crème truffée, jus tranché à l’eau de noix

Vosne Romanée 2000, Domaine Méo-Camuzet

Incroyable mais vrai : on monte encore d’un cran sur ce plat avec ce qui s’avérera à l’unanimité comme LE plat de la soirée. Pas tant dans le côté surprenant de ce plat qui associe finalement des produits relativement classique et « déjà vus », mais simplement par la qualité des cuissons et produits eux-mêmes. Que dire quand c’est excellent ? … rien si ce n’est savourer et profiter de chaque bouchée. Ce que nous avons religieusement fait.

Le Vosne Romanée Méo Camuzet est un très bon partenaire de jeu pour le ris de veau, plutôt souple et gouleyant, il offre une belle rondeur, pas trop puissante, qui vient bien soutenir le plat.

Melba au beaufort d’alpage et genièvre, délicate gelée pimentée

Cornas, 1996, A. Clape

Le problème (enfin, y’à pire comme problèmes… :o) avec notre bande de joyeux drilles, c’est que je suis en minorité flagrante sur mes goûts en vin pour accompagner un fromage. Je n’ai donc pas chercher à faire sensation avec un Chateau Chalon 1991 qui m’aurait bien tenté, me rabattant sur un second rouge, et pour l’occasion, un Cornas de chez Clape. Allez savoir pourquoi, mais je suis dans ma période « Cornas » et voulais déguster ce flacon produit par cet illustre vigneron dans un millésime tout aussi célèbre.

Sébastien, le sommelier, m’avait alerté la veille sur la typicité de ce vin sur ce millésime. Plutôt curieux de nature, je confirme finalement ce choix et il faut avouer que si l’association avec le beaufort n’était pas des plus évidente, ce vin était des plus intéressants. Certains le trouveront parfait, d’autres lui reprocheront son manque de maturité, un vin assez tendu, aux senteurs complexes, fumées, de fruits rouges, même menthe… Pour ma part, je suis plutôt partant pour le laissir vieillir encore quelque peu mais le boire ce soir était déjà un énorme plaisir me concernant.

Gelée de concombre aux perles de citron et à la fleur de bourrache, dans une coque de chocolat blanc, sirop poivré

Vouvray Moelleux « Le Haut Lieu » 2003, Domaine Huet

Excellent premier dessert !! L’association chocolat blanc et concombre est bluffante à souhait. Léger, goûteux et techniquement recherché, un plat de grande qualité. Encore une valeur sûre pour le vin de dessert, j’avais hésité avec un Chidaine mais en l’absence de bouteille en cave, ce Vouvray de chez Huet s’avérera un excellent compagnon de fin de repas.

Poire juteuse rafraîchie à la vanille, fondant au chocolat et tuiles beurrées

Vouvray Moelleux « Le Haut Lieu » 2003, Domaine Huet

Oups, photo oubliée… dommage, ce dessert arborant des associations de saveurs « classiques » se présentait sous une certaine originalité. Puisque vous ne le verrez pas, on va juste vous dire que c’était une nouvelle fois très réussi.

Quelques mignardises


 

La fin de repas approche, le chef Yannick Alleno s’est déjà inquiété à deux reprises de notre bien-être… nous lui avons confirmé tout le plaisir que nous avions pris sur ce menu. Un menu sur mesure qui pour moi rentre dans mes 10 meilleurs repas gastronomiques. Des produits exceptionnels, des cuissons millimétrées, une technique impressionnante et maîtrisée, un vrai grand repas valant clairement les 3 étoiles.

Il faut avouer que les vins ont largement contribué à notre plaisir. De tels flacons, qui restent cependant en entrée de gamme des grands vins de la carte, ne laissent pas insensibles les modestes amateurs que nous sommes.

Nous pousserons même notre douce folie jusqu’à prolonger notre plaisir en commandant quelques digestifs et autres vins de desserts… Parmi ces digestifs, un Cognac Lhérault de 1914… Laurent s’est fait plaisir… le genre d’alcool qu’on ne boit peut-être qu’une fois dans sa vie ? :o)

Mais nous ne serions pas complet en touchant quelques mots du service. Parfait à tout point de vue, nous n’avons non seulement manqué de rien mais nous avons réellement senti le personnel de salle impliqué dans notre repas au-delà de ce qu’on peut rencontrer habituellement. Il n’y avait qu’au Cinq que j’avais connu cela auparavant.

Présent sans encombrer, ouvert sans s’imposer, les échanges furent nombreux, notamment en fin de repas avec Wilfried Morandini, le directeur du restaurant. Amusant de constater qu’ils avaient consulté notre blog (petit moment d’auto-flatterie :o) … ce qui nous emmena dans de longues discussions gourmandes et gastronomiques jusqu’en fin de soirée.

1h30 du matin. Nous sommes les derniers encore à table, temps pour nous de quitter les lieux, non sans remercier une dernière fois le personnel de salle.

Après une telle soirée, une petite claque quand même pour moi qui ne m’attendait pas à un tel niveau culinaire… 3 étoiles amplement méritées pour ce Meurice qui peut se comparer sans crainte au niveau de l’assiette avec les Bras, Gagnaire ou Roellinger.

Groggys dans le taxi, le retour est des plus calmes … les lendemains de fête se ressemblent : on pense au repas,  on revisite les lieux, les noms des vins raisonnent encore…

Une belle soirée de plus, qui donne envie de jouer au poker pendant encore un an…

Laurent V

Lasserre

Dîner du lundi 14 avril 2008

Lasserre … Une institution. Un monument. Une table qui semble être là depuis toujours. Une figure emblématique : René Lasserre, disparu l’an dernier.

Lasserre fait étrangement partie des tables qui m’intriguent, celles que je sais que je visiterai un jour, sans pour autant franchir le pas. Peur d’être déçu, crainte d’un service et cadre pesant, amalgame (ridicule je l’avoue) avec des tables à la réputation et l’ancienneté similaire et qui ne m’attirent pas du tout (Tour d’Argent pour n’en citer qu’une)…

Et pourtant, depuis un reportage diffusé sur Cuisine TV voici quelques années vantant l’homme Lasserre, le lieu, l’atmosphère unique qui s’en dégage et la cuisine de Jean-Louis Nomicos le chef en place, je m’étais dit qu’il fallait un jour tenter l’expérience, entrer dans ce monde à part entière. C’est chose faite depuis lundi soir.

Totalement improvisé – c’était peut-être le meilleur moyen d’y aller me concernant, il me prend vers 18h une envie soudaine de manger dans un établissement de cette envergure (je ne peux malheureusement pas argumenter que j’étais en manque de bonne chair avec le tryptique Gagnaire – Meurice – In de Wulf en 2 semaines… ).

Mais quand on aime on ne compte pas et après des tentatives de réservations infructueuses au Meurice et au Cinq, je me décide pour Lasserre. Ils peuvent nous accueillir ma douce et moi vers 21H. Parfait.

21h pétantes, nous entrons dans ce magnifique immeuble, à la façade subtilement éclairée et sommes accueillis au rez de chaussée, puis conduits, via cet illustre ascenseur, à l’étage où se trouve la salle à manger. Ces quelques secondes depuis notre arrivée donnent le ton et nous transportent déjà quelque peu dans un autre monde. Groom, personnel nœud pap’ et queue de pie… on n’y est plus vraiment habitué.

Notre table est ronde et toute petite, je constate d’ailleurs que les tables sont nombreuses et relativement proches. Située légèrement dans le passage, on ne peut pas dire qu’on soit au calme mais la vue que nous avons sur la salle – sans vis à vis, les orchidées, le toit amovible et le spectacle offert par le service nous convient.

La salle est quasiment comble, je suis vraiment surpris de voir autant de monde un lundi soir (une 60aine de couverts minimum). Une clientèle relativement âgée et souvent étrangère, nous faisons figure, avec nos 35 balais, de minauds dans un monde de grands…  amusant.

Le personnel de salle ne déroge pas à cette tendance, les piliers s’occupant des prises de commande et du service des plats les plus travaillés (nécessitant une découpe ou une préparation en salle tel ces fameuse crêpes suzettes)…

Tout cela est très loin des tables que nous avons l’habitude de fréquenter. Et pourtant, cette ambiance, ce service, ce lieu, dégagent un petit côté sur-anné, belle époque, qui nous ravit comme si c’était ce que nous cherchions ce soir là.

Cerise sur le gâteau, lorsque le pianiste s’installe et se met à jouer, l’ambiance gagne en romantisme et douceur, on oublie l’effervescence, le ballet des serveurs, on savoure cet instant vraiment hors du temps. Reste maintenant à aborder l’objet principal de notre dîner : notre repas.

La prise de commande s’effectue rapidement, une carte claire et lisible, pas de surprise sur les tarifs, un choix d’entrée, poissons, viandes et desserts à la carte et un seul menu au programme : Dégustation en 7 services, 185€.

Contrairement à mes habitudes, ce sera à la carte car je ne vous l’ai pas encore révélé mais j’étais venu aussi pour déguster un plat en particulier : les macaronis aux truffes noires et foie gras.

Pour entamer ce dîner, une petite coupe de champagne (Alfred Gratien, Brut, n.m.) qu’accompagneront 3 amuse-bouches vraiment savoureuses et joliment dressées.

En entrée, pas de surprise donc. Pour accompagner nos macaronis, notre choix de vin se fera au verre, avec un Chassagne Montrachet, château de Citeaux.

Macaronis aux truffes noires et foie gras

Que dire… dès la première bouchée, c’est simplement délicieux, fantastique en bouche, équilibré.
La truffe est bien présente, la cuisson des macaronis est parfaite malgré un passage au four qui aurait pu les rendre (trop) croustillants. Ayant autopsié l’intérieur d’un macaroni, la brunoise céléri/truffe/foie gras est bien présente, les produits étant parfaitement dosés. La sauce aux truffes et la crème au parmesan qui accompagnent sont sensationnelles. Vraiment magnifique. Je suis venu, j’ai vu, je ne suis pas déçu.

Passons aux plats. Pour ma douce : Noix, joue et ris de veau de lait, saisie, confite et croustillants salsifis et côte de romaine, jus truffé

Aux dires de ma chère et tendre, ce plat était fabuleux, la noix est frottée aux épices douces, le ris est légèrement croustillant et parfaitement cuit, tandis que la joue est servie fondante. Elle se régale. Pour avoir « achevé » son plat ( …:o) je ne peux que confirmer, soulignant d’ailleurs un excellent jus truffé…

Pour moi : Pigeon André Malraux, fruits et légumes de saison (encore un classique de la maison).

Après avoir goûté en début février une proposition similaire chez Piège au Crillon, il était intéressant d’identifier les différences et préférences.
Aucune hésitation me concernant : ce pigeon était ici nettement plus abouti. Moelleuse, la farce au foie gras est moins compacte car plus fondante, ce qui rend au final le plat bien plus goûteux et moins écoeurant que celui dégusté au Crillon qui s’essouflait un peu trop sur la fin. Pas de cela ici, ce plat tient la distance, très bien aidé par ces légumes et fruits, superbement bien cuits et d’une qualité exemplaire.

Pour accompagner ces viandes, un verre de Vin du Pays de l’Herault, Domaine La Terrasse d’Elise, cuvée Le Pradel – une belle découverte, un nez typique des vins de l’Hérault, une bouche relativement jeune mais qui proposait un bel accord avec le pigeon.

Direction les desserts et pour les accompagner un verre d’Auslese autrichien de chez Kracher.

Timbale Elysée Lasserre

Mille-feuille aux fraises des bois, crème légére à la vanille 

Pas grand chose à dire sur ces réalisations si ce n’est que c’était très bon : excellents produits, superbe légèreté du mille-feuille, j’aurais peut-être apprécié d’avantage de crème vanille… :o)

23h30, les tables se libèrent une à une, nous ne sommes pas les derniers mais presque. Après avoir remercié le personnel qui s’était occupé de nous (bon service par ailleurs, bien évidemment rôdé, à l’écoute, ouvert aux petits bavardages entre passionnés), nous quittons à notre tour les lieux et reprenons cet ascenseur pour rejoindre le vestiaire et la sortie.

Surgit alors au rez-de-chaussée, le chef JL Nomicos himself se dirigeant également vers la sortie…
Je le reconnais immédiatement et me permet de le solliciter, le félicitant pour sa cuisine. Le chef se retourne, sourit, nous salue et démarre alors une courte conversation de quelques minutes.
A l’écoute, je lui parle notre blog et il me suggère de m’envoyer les photos des plats que nous avons dégustés ce soir, ainsi que les recettes… que demander de plus ?? Après quelques échanges sur la blogosphère gastronomique et cette fameuse recette de macaronis que j’avais déjà tentée à domicile, nous le remercions vivement et quittons définitivement le lieu.

Qu’il est agréable de rencontrer de gens qui tiennent parole : après avoir envoyé un mail dans la nuit, JL Nomicos m’a répondu dès le lendemain, envoyant photos, recettes et nous remerciant pour l’intérêt porté à Lasserre et à sa cuisine.

Intérêt que nous confirmons. Ce fut une expérience vraiment très agréable. Un moment hors du temps où tout concourt à vous faire voyager quelques années en arrière. Tout sauf la cuisine de JL Nomicos, qui si elle n’a rien de ludique ou ultra-moderne, propose des réalisations d’excellentes factures, parfaitement présentées, un chef chez qui on sent d’ailleurs un potentiel créatif peut-être bridé par la réputation de l’adresse (ou est-ce simplement dû aux choix de plats – les classiques de la maison – faits ce soir là) ? Ou est-ce une question de temps ? Le Meurice, le Crillon ont vu leur cuisine également évoluer avec le temps… Pas sur. Peut-être simplement une volonté de respecter la philosophie voulue par René Lasserre s’inscrivant définitivement hors du temps, assumant son style et évitant les effets de mode ou autres courants avant-gardistes…

En ce qui nous concerne, nous sommes ravis d’avoir visité cette institution et depuis, une chose est sûre : un retour au déjeuner chez Lasserre dès les beaux jours s’annonce…

GoTiquement vôtre,

Laurent

Ps) encore merci à JL Nomicos pour les photos. Amis lecteurs, vous les reconnaîtrez aisément … :o)