Dîner du samedi 10 mai 2008.
Nous y sommes, nous arrivons au terme de ce périple gargantuesque dans le bordelais.
Après le très bon déjeuner vécu à l’Hostellerie de Plaisance, nous sommes 3 rescapés à clôturer notre séjour gastronomique par un dernier repas chez Walter Deshayes qui tient avec son épouse ce petit restaurant, Anaël, situé dans le centre de Bordeaux.
Les siestes de Laurent L et Guillaume sur la terrasse de Plaisance à Saint-Emilion ont-elles porté leurs fruits ? Pas sûr à les entendre pendant le trajet qui nous ramène à Bordeaux. La fatigue se fait sentir tandis que les organismes ne répondent plus avec la même réactivité. Mais fort heureusement, la perspective de rencontrer Walter, lecteur assidu de notre blog, reprend le dessus et nous apporte un second souffle.
Patrick est toujours aux commandes, il dîne avec nous ce soir, ainsi qu’Alain, fervent bordelais, gastronomiquement passionné et animateur d’un blog tout en finesse que nous apprécions. Nous nous étions rencontré en octobre dernier chez les frères Shan et avions naturellement « accroché ». Une belle soirée qui s’annonce donc…
Arrivés au restaurant, nous entrons dans la salle tout en longueur, où le bois domine, le tout décoré par quelques éléments et voilages de couleur rouge et … bordeaux. Nous sommes agréablement accueillis par l’épouse de Walter en charge de la salle puis par Walter lui-même qui déboule des cuisines. On le sent timide et réservé, aurait-il la pression en cette douce soirée ? Il ne faut pas, on est là pour se faire plaisir…
Patrick, qui est ici un peu chez lui, comme un peu presque partout à Bordeaux, propose qu’on s’installe et prenne l’apéritif, suggestion à laquelle nous nous plions sans trop résister.
Sur table, Walter a préparé un petit menu à notre attention, décliné en 3 services : entrée imposée, choix du plat et choix de dessert. Avec les vins et les eaux, nous en aurons au final pour 45 euros par personne.
Des prix très doux donc pour un restaurant pas comme les autres. Et posons-nous la même question que pour les frères Shan ? Pourquoi Anaël ?
Plusieurs éléments de réponse : une rencontre par blogs interposés, un goût partagé par Walter et GoT pour quelques tables qui nous sont chères (noma, In de Wulf, L’Air du Temps…), des retours positifs de plusieurs visiteurs/bloggeurs dont notre ami Patrick, mais aussi Chantal… et enfin tout simplement parce que la gastronomie ne se limite pas aux tables connues et réputées, il existe aussi des chefs, à la tête d’établissements à taille humaine, qui chaque jour essaient de délivrer le meilleur d’eux-mêmes, au service d’une clientèle généralement fidèle et réceptive au plaisir d’un repas sans chichis.
Cela s’applique selon nous à ce que propose Walter et son épouse avec Anaël : ils font tout à 2, n’ont pas de personnel et réalisent la performance de servir une vingtaine couverts à chaque service (car à ces tarifs là, le restaurant est souvent complet), réalisant une cuisine créative, recherchée, travaillée sur le visuel et d’une sincérité vraiment touchante. Nous ne pouvions pas ne pas leur rendre visite.
Mais trêves de bavardages… il est temps d’aller voir ce que cela donne dans l’assiette (GoT ne se lasse pas de cette réplique de François Simon…
Au programme ce soir…
Le Truc en plus (3 petites préparations inspirées par le marché)
de gauche à droite :
– Blinis au cabilaud mariné à l’anis vert : frais, bien équilibré
– Crème de moules au galanga : délicieusement gourmand, on en redemanderait bien…
– Petite salade aux légumes croquants, fenouil, chou blanc et poulet aux épices : correct sans être bouleversant
Globalement de bonnes petites entrées, bien réalisées et présentées.
Notre choix fut quasi unanime pour le plat principal :
Pêle Mêle : onctueux de boudin noir pom’curry, ravioles betterave/brocolis, crevettes croustillantes, p’tit pois carottes, oeuf moelleux et quinoa
Cette photo résume à elle seule pourquoi Anaël mérite le détour, et le respect : réaliser de telles assiettes (dont la composition peut se discuter mais ici on savait à quoi s’attendre : du pêle-mêle) seul en cuisine est une véritable prouesse. Car si les autres plats à la carte ne partent pas forcément dans autant de directions, ils suivent tous la même logique en proposant plusieurs petites préparations autour d’un même thème ou produit. Ce qui génère un travail conséquent et demande une organisation et rigueur omniprésente pour satisfaire une clientèle gourmande et qui vient pour en prendre plein l’assiette.
Intéressant de constater le jeu des textures (petit cube pois/carottes), la précision de la raviole de betterave bien exécutée et couvrant une mousse de brocolis subtilement assaisonnée. L’oeuf et le quinoa fonctionnent bien et sont parfaitement cuits, seule la langoustine croustillante sera moins surprenante. Sauf si comme Laurent L vous la trempez dans l’onctueux de boudin noir…
Parlons-en de ce boudin noir : nous devons reconnaitre que c’était un peu too much pour nous, arrivant à saturation – tiens donc…, mais la réalisation était d’excellente facture, tiède et onctueuse, une vraie gourmandise… dommage que nous n’ayons pu en profiter d’avantage.
Sur les douceurs, choix entre plusieurs suggestions :
– Délices d’initiés : fraise/rhubarbe, crème brulée lavande, croustipom’pêche, sorbet abricot
Un excellent dessert, sur la fraîcheur avec l’association fraise / rhubarbe et le sorbet, contrastant avec des saveurs plus sucrées et tièdes du croustillant aux pommes. La crème brulée est parfaitement réalisée. Très bon.
– Dingue de chocolat : pour les fans tout simplement
On a beau être fan, y’a des moments où votre estomac ferme boutique, descend le store et ferme pour travaux. C’est ce qui est arrivé à Guillaume qui a craqué à mi-chemin sur ce dessert, dernier des derniers plats de notre séjour… nous ne sommes pas des machines… les Laurent’s se sont chargés de finir son assiette, histoire de vous confirmer l’essentiel : ce dessert est excellent. Le chocolat est présenté sous différentes textures et préparations. Un dessert goûteux, cohérent et bien réalisé.
– Horizons lointains : brioche, fruits d’ailleurs, pina colada
Laurent L avait bien caché son jeu. N’ayant pas forcé sur le boudin noir, il s’était réservé pour ce dessert, qu’il put apprécier à sa juste valeur (càd excellent) et de fait achever ce repas avec éclat.
Ces desserts révèlent aussi la personnalité du chef Walter : généreux, travaillés, cohérents… le voilà devenu en peu de temps l’un de nos autres fournisseurs officiels de plaisir.
Pour accompagner tout cela, après un apéro au vin blanc, une bouteille de Montagne noir, Syrah, 2005, Vin de Pays d’Oc, suivi d’un bon Footprint 2006, Merlot Pinotage d’Afrique du Sud.
23h, le restaurant, complet pour cette soirée, se vide petit à petit et nous nous retrouvons entre nous avec Walter qui nous rejoint, curieux et presque inquiet de notre feedback. On le rassure tout de suite, cela s’est très bien passé. On a pris un vrai plaisir à déguster ces préparations qui jouent avec nos papilles. Et très vite la discussion dévie sur notre périple, notre roadbook 2008 et les tables que nous aimons.
20 minutes plus tard, nous prenons congé des lieux en remerciant encore Walter et son épouse pour cet agréable dîner chez Anaël, Salon des Délices, voilà qui porte bien son nom.
A peine sortis du resto, Patrick et Alain croisent une jeune demoiselle qui les reconnait et les embrasse… Ah ces bordelais, quelles stars… Nous saluons à notre tour Alain qui partagea avec nous ce dernier repas dans une excellente petite ambiance – on en attendait pas moins de lui :o), espérant nous revoir prochainement à Bordeaux ou ailleurs…
Patrick nous ramène donc pour la dernière fois à Arsac. Car le lendemain, c’est retour sur Paris et back to reality.
Mais il n’est pas encore temps de faire le bilan, nous savourons notre repas et rejoignons notre hôtel dans une douce quiétude, objectif lit : meilleur compagnon d’un GoT après 6 repas consécutifs.
Maintenant on peut le dire : cà c’est fait, et bien fait.
GoT