Pastorale

Dîner du vendredi 20 mars 2009

GoT était à nouveau en vadrouille vendredi dernier. Direction la Belgique et la petite ville de Reet où se trouve le restaurant Pastorale, l’un des 10 double étoilés belge.

Pourquoi cette adresse ? Deux éléments de réponses :

– parce que chaudement recommandée par Kobe d’In de Wulf et San de l’Air du Temps qui en parlent comme l’une des meilleures tables du pays,

– parce que j’avais assisté à la présentation de Bart de Pooter, chef de Pastorale, aux Flemish Primitives en janvier dernier, présentation ultra bien réalisée et donnant plus qu’envie de visiter cette adresse encore inconnue pour nous tous.

Réservation fut donc faite en janvier dernier et c’est avec l’impatience, la forme et la faim des grands jours que nous avons pris la direction du nord ce vendredi après-midi.

2 véhicules, 6 convives, tous les habitués sont présents, à l’exception de Guillaume (première absence en 3 ans !, tout arrive…), Sabine le remplacant en guest star du jour.

Nous arrivons dans les horaires prévus à l’hôtel Domus à Boom, localité située à 4km du resto, très bel établissement, superbes chambres, hautement recommandable en cas de logement sur place.

Quelques minutes plus tard, nous nous garons devant Pastorale, magnifique demeure, bel éclairage, et sommes accueillis par l’épouse de Bart.

L’accueil est extrêmement agréable, on nous conduit à notre table, dressée au centre de la salle à manger immaculée de blanc où seules quelques fleurs rouges et cadres contemporains apportent un contraste de couleur absolument superbe.

Pendant que chacun prend place à table, je vais saluer Bart en cuisine. Contrairement aux autres repas GoT, je n’avais pas contacté le chef au préalable pour fixer menus et vins. Mais le hasard fait bien les choses (était-ce vraiment le hasard ?), Bart m’informe qu’il a prévu un menu 10 services estimant, après avoir consulté notre blog, que cela conviendrait mieux à notre soirée, … je n’ai pu que lui donner raison, le remerciant pour son initiative, il ne pouvait pas mieux faire.

Place enfin à l’apéro, notre déplacement méritait un belle bouteille et on part, après consultation générale et accord unanime, sur un Selosse Substance, bouteille qui sera une « première » pour la plupart d’entre nous.

Aussitôt, les premières mises en bouche arrivent et offrent une entame croustillante : légumes crus, radis dans une présentation qui rappelle Noma, croustillants à la crème de carotte et cumin. Goûtus et légers, très bien pour commencer.

Le Selosse Substance est un pur bonheur. Dégorgée en 2007, cette bouteille offre tout ce que j’aime sur un champagne de vigneron, le seul problème étant qu’une fois qu’on a goûté à ce genre de flacons, il est difficile de s’en passer par après.

Bart vient alors saluer notre table afin de présenter son menu et bonne nouvelle, aucun souci, fumée blanche : le menu convient à tous, nous sommes prêts pour les festivités.

Côtés vins, on part sur un choix à la carte, ce qui nous permettra de déguster quelques belles bouteilles, on est là pour se faire plaisir (et nous ne faillirons pas à notre leitmotiv préféré).

Entre deux dégustations, on prend un peu de temps pour observer ce cadre assurément contemporain qui nous ravit à l’unanimité. Une superbe salle de restaurant où on sent que chaque détail a été réfléchi, et cela me rappelle l’exposé de Bart au Flemish Primitives, expliquant qu’une expérience au Pastorale doit interpeller tous les sens. Priorité à l’assiette bien évidemment mais recherche d’adéquation et de cohérence dans tout ce qui entoure un repas : le cadre, le décor, la musique, le dressage de la table, le service. Une chose est certaine, on s’y sent merveilleusement bien.

En seconde mise en bouche, une association betterave /moutarde nous est proposée, betterave en différentes textures, la moutarde sous forme de glace. Mariage devenu maintenant un classique du genre mais réalisé ici à un niveau de précision encore jamais égalé, l’équilibre des 2 saveurs est parfait.

Foie gras d’oie, lobe, pomme et cidre, jeune poireau

Riesling Schieferterrassen, 1999, Heyman-Loewenstein

Première entrée tout en douceur et finesse. Le foie d’oie est fantastique de douceur et texture. Littéralement fondant en bouche, l’association avec le cidre, la pomme et le jeune poireau est dès plus réussie : sucrée salée avec le cidre et la pomme  et plus surprenante sur le poireau, le tout avec le dégré d’acidité qui va bien.

On ne change pas une équipe qui gagne, le Riesling de chez Heymann fait plaisir et se positionne bien en accord.

Veau, printanière, tartare au raifort, carpaccio à la sarriette

Meursault, 2004, Les Tessons, Clos de mon Plaisir, Domaine Roulot

Lorsque les couverts pour la seconde entrée sont disposés, on constate que chacun a reçu une paire de ciseaux devant lui… on ne voit pas encore trop à quoi cela peut servir… surprise.

Ce sera pour moi le plat le plus surprenant du dîner mais aussi celui qui m’a apporté l’une des bouchées les plus incroyables depuis longtemps. A gauche, du cresson, frais, à découper… avec ses ciseaux. Ensuite le veau en tartare, puis le carpaccio et à droite le granité pomme/concombre. Si le tartare est bon, la bouchée de carpaccio/granité/cresson est exceptionnelle de goûts, explosive en bouche. Plus tard, Bart révèlera que le veau en carpaccio relève d’un travail assez minutieux et complexe de traitement de la poitrine de veau à la pince à épiler pour récupérer les morceaux les plus nobles…. incroyable.

Avant de passer au plat suivant, Bart revient en salle et nous présente les 2 pièces de Wagyu qui seront servies : l’un est d’élevage belge, l’autre australien. Bart explique que le belge a une texture plus fondante tandis que l’australien a une texture moins persillée mais un goût plus puissant. Il nous préparera les 2 afin que nous puissions apprécier les saveurs de chaque espèce.

Langoustine, lentement cuite au vandouvan, ratatouille « vue autrement », 2009

Meursault, 2004, Les Tessons, Clos de mon Plaisir, Domaine Roulot

Ce plat sera le numéro 1 du menu pour la plupart d’entre nous. 3 langoustines ne composant qu’une seule pièce, une ratatouille déstructurée, bien épicée, une cuisson millimétrée en font un plat exceptionnel.

Le Meursault de chez Roulot est une première pour tous. Tout comme le décrit Nossiter dans son dernier ouvrage, les vins de ce vigneron diffèrent des classiques de la région. Ce vin est moins boisé, moins gras, plus droit en bouche et avec beaucoup de finesse et minéralité tout en gardant la typicité du Meursault.  Belle bouteille qui proposera un bel accord avec le plat.

Turbot, poêlé, radis noir et raifort, jeune chou-fleur, vinaigrette de truffe

Chardonnay, Philippi, 1999, Pfalz

On déroule le menu avec encore un grand plat, d’une incroyable finesse. La vinaigrette de truffe est parfaitement dosée et n’écrase pas les autres produits, notamment le turbot qui se présente parfaitement cuit et en belle association avec le chou-fleur. Grand, très grand plat.

Nous n’avions pas commandé ce Chardonnay, aussi voyant qu’on sera un peu court avant de poursuivre avec La Lune d’Angeli sur le plat suivant, Jon, le discret mais talentueux sommelier, décoche une première flèche et nous sert ce vin à l’aveugle. Un vin au nez perturbant, au goût intéressant, nous aimons tous mais ne le remettons pas sur une carte. Il fallait s’attendre à une bouteille improbable, et ce sera le cas avec ce Chardonnay allemand qui offrira un très bel accord sur le turbot. Entre temps, les bouchons s’accumulent et la série commence à prendre forme…

Jets de houblon, coquille Saint-Jacques poêlée, jets de houblon,  racine de persil, risotto de céréales, mousseline d’avoine

Anjou, La Lune, Mark Angeli, 1999

Ce plat sera à l’origine d’un petit débat à notre table : l’élément principal du plat est-il le jet de houblon ou la saint-jacques. Les avis divergent et Bart apportera la réponse : le jet de houblon est mis ici en valeur, la Saint-Jacques n’étant que l’accompagnement. On est ici sur des notes de douceur, tout en onctuosité en bouche. Le risotto est à tomber par terre mais c’est surtout le houblon et la mousseline d’avoine qui transcendent ce plat, d’une justesse phénoménale.

Quant au vin, l’un des mes préférés en Chenin, il est fidèle à mes attentes, même mieux, je m’attendais à ce qu’il soit un peu plus oxydatif, ce qui n’est pas le cas. Le chenin dans toute sa splendeur, intense, gras, légèrement ambré, offrant puissance et ce qu’il faut de fraîcheur pour accompagner le plat.

Wagyu, carpaccio de wagyu-beef, champignons, noix de Grenoble, céléri-rave, quinoa

Chinon, Clos de la Dioterie, 1996, Charles Joguet

Arrivent les stars de la soirée. A nous de deviner qui est qui. Le wagyu belge est en haut, l’australien en bas. Un plat gourmand, généreux, le produit se suffisant à lui-même. Magnifique.

Sur le vin, je me suis encore inspiré de ma lecture du dernier ouvrage de J. Nossiter, qui encense littéralement les vins de ce vigneron, pour choisir ce chinon de chez Joguet, en 1996. Et il faut avouer que ces vins vieillissent plutôt bien ! Superbe flacon qui ravira notre table.

Agneau de lait des Pyrénées « Axuria », cannelloni de légumes feuillus verts aux herbes, crème de fromage de brebis, jus de persil

Chateau de Pibarnon, Bandol, 2000

Cuisson rosée parfaite, le canelloni de légumes fait débat, l’asperge est puissante en goût, ce qui offre un bon complément à l’agneau. L’agneau s’offre sous 3 formes : côtelettes, rognons et foie. Générosité, encore et toujours. Là aussi, le vin fera merveille, le Bandol apportant soleil, rondeur, puissance au plat. Bon moment encore sur ce plat, légèrement en retrait par rapport aux autres pour moi .

A ce stade de la soirée, on est bien, très bien. Quand je pose la question de rajouter un fromage au menu, les réponses ne se font pas attendre et la commande est aussitôt faite. Mais qui dit fromages dit vin pour accompagner et voilà que les envies divergent. Le sommelier constate notre désarroi et nous rassure en annoncant qu’il prend les choses en main.

Fromages : Chanteraine, Petit Fiance des Pyrénées, Comté 2006, Epoisses, Shropshire blue

La prise en main sera des plus efficaces… En 4 aller-retours, ce sont autant de verres différents qui sont rangés devant nous tel un bataillon prêt pour une revue des troupes.


 
De gauche à droite… :

– Domaine Emilian Gillet, Viré-Clessé, Quintaine 2004

– Champagne Bollinger, spécial cuvée

– Domaine Berthet-Bondet, Côtes du Jura, 2003

– Madeira Verdelho, Cossart-Gordon

Je suis aux anges, et ce pour 2 raisons : ce sont principalement des blancs qui nous sont proposés (et je suis un fervent partisan du blanc avec le fromage), puis autre raison de satisfaction : la générosité dans l’effort : on va pouvoir déguster 4 nouveaux vins… 🙂 .

Quelques instants plus tard apparaissent les fromages, eux aussi rigoureusement rangés et associés avec un condiment sucré qui ravira nos papilles.

Un petit mot sur le pain, fait maison. Depuis le début du repas, nous sommes régulièrement approvisionnés en 3 sortes de pain, dont un sans sel qui est marié avec une superbe huile d’olive. Pour les fromages, on complète l’ensemble avec une planche de pains spéciaux pour la dégustation de fromages. Excellent !

Les 4 vins de dessert sont superbes et proposent des accords pertinents avec les fromages. Au delà du classique comté/vin jaune, le bleu et le madère font excellent ménage. Je suis moins convaincu par le champagne, d’avantage par le Viré-Clessé sur l’époisse.

Cocos, retour de Chamonix

Riesling 2006 Kabinett, Weingut Robert Weil

Coteaux du Layon, 2005, Domaine du Pas Saint-Martin

Lorsque pour les desserts, le sommelier apporte non pas un mais 2 verres, on se dit qu’on l’a tellement chauffé sur les fromages qu’on ne l’arrêtera plus. On adore, c’est exactement le genre de repas dont GoT raffole : de la qualité, de la générosité, de la gourmandise, du plaisir. Et les 4 sont définitivement réunis ce soir…

Un dessert au visuel original, aux textures contemporaines, à la dominante de coco. Un dessert intelligent, aux textures légères et techniquement réalisé avec brio.

Les 2 vins de desserts servis font eux aussi leur petit effet avec une mention spéciale pour le coteaux du Layon.

Après cette séquence fromages/desserts un peu folle, notre table compte les verres vides et chacun garde précieusement les verres qu’il lui reste à boire.

Terminé ? Oh que non. C’était sans compter sur le dernier dessert…

Car en effet, notre dernier met prévu au menu n’est pas encore servi qu’un nouveau verre de vin… de quoi en interpeller certains… 🙂

Le Colombare du domaine Pieropan est un vin étonnant, doux, subtile, avec une belle fraîcheur et suffisament de matière pour accompagner le dernier dessert de notre repas :

Pistache, chocolat

Le Colombare 2003, Domaine Pieropan

Voilà un fantastique dessert qui me rappelle visuellement ce qu’a présenté Albert Adria aux Flemish Primitives ou Ferran Adria au OFF de Deauville à savoir les nouvelles créations d’el Bulli appelées Natura.

Un incroyable jeu de textures, de saveurs pistachées, chocolatées, sans lourdeur, tout en finesse et délicatesse. Une merveille de goût, et de visuel.

Mignardises

Non, ce n’est pas encore fini, un après-dessert sur la fraise en différentes textures réjouit nos papilles.

Bart nous rejoint à table et nous demande si nous avons aimé ce repas. On le rassure immédiatement, lui disant non seulement qu’on a aimé mais bien plus que cela : on a adoré…

Bien sur, la vedette de Pastorale, c’est l’assiette. Les produits sont superbes, les cuissons sont justes. Ce qui n’enlève rien à la complexité des plats. Car la complexité est bien présente, même sur des assiettes où elle ne vous explose pas à la figure visuellement. Beaucoup de travail, beaucoup de technicité permettant de délivrer de fabuleux plats. Nous avons aimé ce menu très équilibré, proposant tantôt un côté ludique avec ce cresson et sur le veau, tantôt le produit pour le produit avec le wagyu. Et avec une constance : de grands plats. La langoustine, le turbot, la wagyu, le houblon (pour certains) et le veau seront probablement dans les plats de l’année.

Mais Pastorale, c’est aussi Bart et son épouse. Ils sont l’âme de Pastorale. Le décor contemporain et épuré, l’ambiance détendue, la créativité maîtrisée, le style de service professionnel mais joueur, tout a été conçu et se veut à l’image de la philosophie que Bart veut inculquer à sa cuisine.

Pour certains guerriers, les digestifs font ensuite leur apparition et là encore, certains se verront copieusement servis, notamment notre Laurent L qui aura le plaisir de déguster 3 bas-armagnacs de chez Darroze.

Il est plus de 2 heures du matin, nous n’avons pas vu le temps passé. Nous avons longuement échangé avec Bart, qui nous parle franchement de sa cuisine, de ce qu’il aime, de sa philosphie de travail en cuisine. Ce chef est extrêmement attachant et nous offre son livre « Just cooking », très bel ouvrage qui présente non seulement un ensemble de réalisations culinaires mais aussi ce qu’est Pastorale, toujours ce souci d’aller au delà de l’assiette et d’expliquer différement son restaurant.

Nous sommes sur le départ lorsque l’idée nous vient de visiter les cuisines, Bart accepte bien gentillement. Et d’entrée, on ne peut s’empêcher de remarquer le slogan affiché : One Team, One Philosophy, One target. Rien à ajouter.

Ou plutôt si, rajoutons un mot : Surprise. Un mot qu’apprécie Bart. Et nous aussi. Et ce soir, nous avons aimé avoit été surpris, du début à la fin : un menu « sur mesure », des vins à profusion en dégustation, un livre offert – souvenir d’une belle soirée, la disponibilité de Bart et son épouse, toutes ces surprises ont agrémentées une soirée que nous ne sommes pas près d’oublier.

Une dernière photo pour la route et nous quittons Pastorale, avec nos livres sous les bras et des souvenirs plein la tête.

Merci à Bart et toute l’équipe pour ce beau moment. On était venu pour vivre et découvrir de nouvelles émotions. L’objectif est incontestablement atteint.

GoT

ps) prochains posts : 5 jours au Japon, Chateaubriand, Noma, Geranium, …

Pur’Grill

Dîner du jeudi 22 janvier 2009

Le Pur’Grill est la table gastronomique de l’hôtel Park Hyatt Vendôme, proche de la place du même nom. Le quartier respire strass et paillettes mais point de tout cela ici, on est dans un lieu au design contemporain, épuré, qui contraste avec bonheur aux standards du quartier. Aux manettes : Jean-François Rouquette, ancien chef du Scribe, qui a depuis maintenant quelques années repris la cuisine du Pur’Grill avec à la clé une première étoile décrochée en 2008.

Et annonçons le tout de suite : attention grande table ! Trop peu connue, très peu médiatisée, et pourtant elle présente la panoplie complète de ce que propose un restaurant de ce standing de nos jours : une cuisine lisible (tiens, cela me rappelle quelque chose), des produits exemplaires, un service professionnel et sans lourdeur, un cadre agréable et confortable.

Pour cette soirée, j’avais réservé la Table du chef, concept où pour un budget « tout inclus », vous mangez… à la table du chef dans un cadre privatif, bordant la cuisine (on est bien plus que spectateur, on est littéralement plongé dans l’effervescence d’un service du soir, en contact direct avec les cuisiniers, les produits…). Le concept prévoit un menu à 8 services que le chef propose et finalise avec vous lors de votre arrivée à table. Toujours dans ce concept, de très beaux flacons sont prévus et associés au menu.

A notre arrivée, après un premier apéro pris en terrasse chauffée, nous sommes accueillis et guidés à cette fameuse table. Chaises hautes, vue à 180 degrés sur la cuisine, c’est un spectacle plutôt agréable, conforme à ce qui nous avait été annoncé.

Le chef vient immédiatement nous saluer et nous présente les produits et le menu du jour. Huîtres, bar, asperges, veau… tout cela est prometteur et nous nous laissons guider bien docilement.

Côté vins, ce sera la surprise la plus totale, la seule chose que nous savons est que nous démarrons au Krug Grande Cuvée. Pour la suite, le sommelier vient s’enquérir de nos envies, des régions que nous aimons (ou pas) afin de cibler les vins qui nous feraient plaisir tout en s’accordant avec le menu.

Avec les amuses bouche, on nous sert un Krug Grande Cuvée. Instant magique. Une première pour tous. Ce champagne ne ressemble à aucun autre, affiche une finesse et puissance incroyable, tout comme sa longueur en bouche. Un vin très droit dont on se délecte à chaque gorgée.

Huîtres Belon de chez Cadoret à la chlorophylle de cresson, perles du Japon et caviar impérial de France
Krug Grande Cuvée

Excellente première entrée. Les huîtres sont tièdes, juste passées sous salamandre. L’association avec le cresson apporte un peu de verdeur à un ensemble plutôt tourné sur l’iode. Les perles du Japon apportent un peu de rondeur , les enokis le croquant tandis que le caviar offre la touche finale fumée, iodée, qui enrobe le tout. L’accord avec le champagne quant à lui est simplement phénoménal.

Etuvée de cuisses de grenouilles et haddock au vin jaune, légumes aux herbes potagères
Krug 1996

Plat suivant et toujours autant d’excellence dans la réalisation. La cuisson des cuisses est parfaite, la sauce au vin jaune sublime et tout en délicatesse. Le haddock est presque imperceptible, il apporte juste un peu de fumé qui équilibrera très bien le plat.

Pour accompagner ce plat, on découvre le vin suivant et ô surprise, toujours un Krug, mais millésimé 1996 cette fois. Et là, que dire ? Rien… c’est juste exceptionnel. Fumé, d’une puissance et longueur encore supérieure au précédent, c’est une merveille qui s’accorde de surcroit très bien avec notre plat. Un champagne qui transporte, qui opère avec magie et de manière immédiate. J’avais trouvé le Salon 88 plus vineux, encore plus fumé, avec moins d’équilibre. Ici, on a encore une magnifique fraîcheur, une belle acidité de fin de bouche très droite, avec d’avantage de matière cependant. Impressionnant. Je pense alors aux dégustations de François Audouze qui est coutumier de dégustations de ce champagne dans des millésimes bien plus anciens encore… et ma curiosité s’en retrouve d’avantage en éveil.

Premières asperges vertes de Provence à croquer… ravigote estragon/pistache
Krug 1996

Beaux produits, présentation originale, en bouche c’est fidèle à l’énoncé, les goûts se reconnaissent aisément tout en se mariant avec bonheur. Un beau plat.

Bar de ligne poêlé, frotté aux écorces d’agrumes, côtes et vert de blettes, vinaigrette au yuzu
Vougeot 1er cru 2004, Le Clos Blanc de Vougeot, Dom. de la Vougeraie

Cuisson millimétrée, portion plus que copieuse, qualité de produit irréprochable, on continue sur notre lancée. La vinaigrette au yuzu est remarquable de finesse, les blettes apportent la mâche et le croquant nécessaire, le tout se présentant en totale harmonie.

Pour le vin, encore un grand moment, on nous sert un Vougeot blanc 2004, année pas forcément grandiose mais sur des vins de ce calibre, cela se laisse boire avec aisance. Le vin dégage immédiatement puissance, boisé, rondeur aisément reconnaissable au chardonnay et s’avérera réellement excellent , se mariant parfaitement avec le bar.

Rillons de ris de veau en escabèche, ravioles d’augergines et basilic
Cuvée Mélusine 2007, AOC Corse, Domaine Vecchio

Une préparation de ris aux saveurs de sud très prometteuse dans son intitulé et parfaitement réalisée. La cuisson du ris est dorée, la chair étant saisie et fondante à souhait.  L’association avec les ravioles d’aubergines, câpres fonctionne à merveille, un plat gourmand, sobrement réalisé mais très savoureux.

Sur le rouge, dégusté à l’aveugle, on sèche un peu. J’identifie du syrah, un vin du Rhône ? Avec un tel plat, il faut encore aller plus au sud pour découvrir cette cuvée atypique à faible production (1820 bouteilles en l’occurrence) pour un très beau vin, puissant et bien équilibré, qui achèvera parfaitement ce repas.

Chantilly de Brie de Meaux, caramel de pommes

Préparation contemporaine pour ce brie tout en onctuosité et douceur, une pure merveille…

Asbolument chocolat Grand Cru, craquant/glacé/fondant

Le Pur’Grill est aussi réputé pour son chef pâtissier, Jean-Francois Foucher. Notre homme fait son apparition en milieu de soirée et se met à sortir dessert sur dessert, tous aussi beau et technique les des autres, un régal pour les yeux. Le nôtre, 100% chocolat, sera d’une légèreté totale et de très haut niveau. Notre gourmandise en aurait presque demandé une seconde portion 🙂

Quelques instants plus tard et voilà qu’il nous propose quelques mignardises pour accompagner cette fin de repas… nous ne nous priverons pas de faire honneur au chariot qui s’avance devant nous.

Et ainsi s’achève ce magnifique repas. Régulièrement, JF Rouquette est venu aux nouvelles, s’inquiétant de notre bien-être. Nous ne lui avons pas caché notre satisfaction. Non seulement le concept est extrêmement agréable, mais – et c’est bien là l’essentiel, la cuisine délivrée ici est de très haut niveau, travaillant de beaux produits mis en valeur avec talent. Les assiettes qui sortent de cuisine jouent sur 3 ou 4 goûts, directs, tranchés, les associations sont justes et sans artifice. Côté dessert, JP Faucher fait merveille avec des desserts alliant créativité, goût et technicité. Du grand art.

La carte des vins recèle une multitude de trésors qui méritent d’être découverts, voilà qui appelle sans hésitation une nouvelle visite . Pour ma part, je retiens également cette dégustation du Krug, non pas une mais 2 cuvées différentes. Et je dois admettre que si cette gamme de champagne m’a toujours interpellé par ses niveaux de prix prohibitifs (avec l’éternelle question : est-ce que cela les vaut ?), force est de constater que boire ce champagne, comme le Salon d’ailleurs, fait partie des choses que l’on n’oublie pas dans une vie. Ces champagnes viennent d’un autre monde, et transportent le dégustateur au-delà de ce qu’un vin normal peut normalement générer. Un souvenir unique assurément.

Il est minuit passé lorsque nous quittons les lieux, non sans remercier l’ensemble du personnel qui nous a servi ce soir. Une très belle soirée, qui devait s’achever gentillement par un retour maison, mais que nous prolongerons finalement au bar d’un hôtel voisin… on est faible, très faible.

Laurent V